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Claude Murat1, Flora Todesco2, Armelle Gollotte3, Christine Robin4, Zaklina Marjanović5
1 UMR IAM, université de Lorraine – INRAE, 54280 Champenoux (France)
2 WETRUF SAS, 54500 Vandoeuvre-Les-Nancy (France)
3 Laboratoires SPIRAL, 21560 Couternon (France)
4 Pépinières ROBIN, 05500 Saint-Laurent-Du-Cros (France)
5 Université de Belgrade, 11000 Belgrade (Serbie)
Du 27 au 30 septembre avait lieu la première conférence du groupe TRUE (Truffle Research Union of Europe) à Belgrade en Serbie. TRUE fait suite au groupe TAUESG créé en 2009, qui était focalisé uniquement sur Tuber aestivum, pour inclure les autres espèces de truffes.
Cinquante participants provenant de 12 pays Européens et deux hors Europe (Argentine et Maroc) se sont réunis pendant quatre jours pour présenter leurs dernières avancées scientifiques et techniques dans le domaine de la truffe et de la trufficulture.
Le congrès était organisé par Zaklina Marjanović de l’Université de Belgrade (Serbie) et Christina Weden de l’Université d’Uppsala (Suède). La France était bien représentée avec Gérard Chevalier retraité de l’INRA, Zhixiao Babel-Chen, Lora Gigleux et Claude Murat d’INRAE ; Armelle Gollotte des Laboratoires SPIRAL ; Christine Robin, Pierre Cammalletti, Flavie Clariond et Marie Touche des Pépinières ROBIN ; et Flora Todesco de WETRUF.
La première journée a commencé avec trois présentations plénières : la première de Giovanni Pacioni (Université de L’Aquila, Italie) était focalisée sur la taxonomie des truffes. Beaucoup d’espèces ont été décrites au 19ème siècle mais peu au 20ème. Au 21ème siècle plus de descriptions combinant morphologie et biologie moléculaire ont été réalisées. Ces espèces ont été décrites soit hors Europe, soit dans des régions Européennes peu étudiées jusque-là, comme la péninsule Ibérique et les Balkans. Il y aurait 50 espèces en Europe, dont 14 décrites après 2017. Giovanni incite les jeunes chercheurs à déposer des échantillons dans les herbiers pour qu’ils servent de références et afin d’éviter les synonymes comme cela est trop souvent le cas.
La deuxième présentation de Sergi Garcia-Barreda (CITA Saragosse) a repris plusieurs études réalisées ces dernières années sur l’effet du climat sur la production espagnole de truffe, les pièges à truffes et les parasites des truffes dont les Leiodes. Une diapositive a retenu plus particulièrement notre attention. Sergi décrit la production espagnole, qui a augmenté à la fin de la deuxième guerre mondiale suite à l’essor des récoltes de truffe en milieu sauvage. Mais la surexploitation et la modification du milieu ont entrainé l’arrêt de cette augmentation à la fin des années 60, pour ensuite diminuer et passer de 80 tonnes à environ 20 tonnes. L’essor des plantations depuis les années 90 a conduit à une augmentation exponentielle de la production à partir de 2010, pour dépasser les 100 tonnes actuellement. Ces chiffres démontrent bien que les efforts de plantations sur de grandes surfaces, ainsi qu’une approche professionnelle de la trufficulture, conduisent à une augmentation significative de la production.
Si les plantations sont possibles, c’est grâce aux plants mycorhizés ; lors de la troisième conférence plénière de ce premier jour, Gérard Chevalier (retraité INRA, France) a présenté l’historique du plant mycorhizé, et Domizia Donnini (Université de Perugia, Italie) a quant-à-elle insisté sur l’importance du contrôle qualité des plants avant plantation. Elle propose une définition commune pour les plants mycorhizés avec les truffes et une harmonisation des méthodes de contrôle au niveau Européen. Dans les différentes présentations, les pépiniéristes français ont été mis à l’honneur avec des succès de production dans plusieurs pays comme la Serbie pour AGRITRUFFE et la Lettonie pour les Pépinières ROBIN.
Les conférences se sont poursuivies les 28 et 29 septembre. Nous n’avons pas la possibilité de détailler chaque intervention dans cet article, c’est pourquoi nous avons fait le choix de citer certaines études. Les Balkans ont une grande diversité d’espèces de truffes. L’une des plus connues est la truffe blanche T. magnatum. Zaklina Marjanović (Université de Belgrade, Serbie) a très bien exposé les exigences écologiques de T. magnatum. Cette présentation aurait dû être réalisée par Gilberto Bragato (CREA Gorizia), probablement le plus grand expert des sols à T. magnatum au monde, mais malheureusement un accident l’a empêché d’être présent.
Selon eux, cette truffe est bien la truffe du Piémont, mais non pas du fait de la région italienne, mais plutôt de l’environnement dans lequel elle est récoltée. En effet, elle se retrouve en Italie et dans les Balkans principalement dans des fluviosols calcaires, souvent en bas de pente, où il existe des dépôts dus à l’érosion et une nappe phréatique présente peu profondément. Si T. magnatum est récoltée exclusivement en milieu boisé, sa culture commence à se développer entre autres en France grâce à la production d’arbres mycorhizés produits sous licence de savoir-faire INRAE/Pépinières ROBIN. Pierre Cammalletti, responsable du laboratoire des Pépinières ROBIN (France), a présenté l’historique du projet qui a conduit à la production et commercialisation des plants mycorhizés avec T. magnatum.
Claude Murat (INRAE Grand-Est, France) a ensuite présenté l’évolution de la production dans la première plantation productive hors zone de distribution de cette espèce et en milieu agricole. La production a commencé en 2019 à 4 ans et a continué depuis, tous les ans. La compétition entre les mycéliums de T. magnatum et T. melanosporum, toute deux présentes dans cette plantation, a été présentée et discutée lors de cette conférence.
Si T. melanosporum n’a pas encore été retrouvée spontanément dans les Balkans, T. brumale y est bien présente avec à priori plusieurs espèces proches. Deux nouvelles espèces du groupe brumale ont ainsi été présentées : T. thracicum en Bulgarie par Monica Slavova (Académie des Sciences de Sofia, Bulgarie) et T. balkanicum en Serbie par Zaklina Marjanović (Université de Belgrade, Serbie).
Plusieurs présentations ont abordé la gestion de l’eau, avec des études réalisées en Espagne présentées par Daniel Olliach (CTFC Solsona, Espagne), et les résultats de CulturTruf présentés par Flora Todesco, projet sur lequel elle a travaillé au sein d’INRAE avant la création de WETRUF. Ces deux études montrent l’intérêt de l’utilisation du potentiel hydrique (pF) pour le pilotage de l’arrosage en truffière de T. melanosporum. L’arrosage piloté fait maintenant partie des techniques culturales indispensables pour assurer une production régulière de truffe noire.
D’autres résultats de CulturTruf ont été présentés comme l’impact du climat sur le mycélium de T. melanosporum par Zhixiao Babel-Chen (INRAE Grand-Est, France) et par Armelle Gollotte (Laboratoires SPIRAL, France) qui a quant-à-elle proposé un focus sur la gestion de l’eau pour la truffe de Bourgogne.
Armelle a aussi présenté une analyse prometteuse sur la conductivité électrique du sol dans une truffière en production. Cette technique permet un zonage des sols à l’échelle de la parcelle, elle varie suivant plusieurs facteurs comme la composition des sols, l’humidité, la concentration en ions… Le principal résultat montre que 85 % des truffes sont récoltées dans les zones à faible ou moyennement faible conductivité. Des analyses sont en cours pour comprendre les différences en termes de texture, structure et composition physicochimiques des différentes zones.
Jose-Antonio Bonet (Université de Lleida, Espagne) a présenté une plantation de T. melanosporum réalisée en tant que barrière à feu. Cette plantation étant isolée, elle a été réalisée avec des paillages et n’a pas été réellement entretenue. Les paillages ont été retirés 5, 8 et 11 ans après plantation, sans impact significatif sur la quantité de mycélium de truffe dans le sol en fonction du temps de paillage. Une bonne corrélation entre le diamètre au collet et la quantité de mycélium du sol a été retrouvée ; les premières truffes ont été récoltées mais les chercheurs sont conscients que ce site étant visité par plusieurs caveurs, sa production exacte n’est pas connue.
Les Leiodes et autres parasites invertébrés n’ont pas été oubliés avec deux conférences sur le sujet, l’une par Aleksandra Rosa-Gruszecka (Institut de recherche forestière Raszyn, Pologne) qui a décrit la diversité des Leiodes en Pologne, et l’autre par Paul Thomas (Université Stirling, Angleterre) qui a présenté un projet à grande échelle de collecte d’invertébrés retrouvés chez T. aestivum en Europe. Pour finir, le stockage de carbone dans les truffières a fait l’objet d’une présentation par Alexander Urban (Université de Vienne, Autriche), sujet complexe mais très intéressant pour le futur, alors que cet aspect positif des plantations truffières est encore trop négligé.
La première journée de conférence s’est terminée par un repas de gala offert aux participants par les pépinières ROBIN en l’honneur de leur 75ème anniversaire. Comme à l’accoutumée en Serbie, les portions étaient copieuses et généreuses et les plats très diversifiés. Et comment ne pas citer la purée à la T. magnatum ? Un vrai délice !
Après les deux journées de conférences, la journée du samedi était consacrée aux visites de terrain. Nous avons dans un premier temps fait une halte dans un parc national dans lequel T. aestivum est naturellement récolté. L’essence principale est le charme et la zone visitée présente un sol de Loess calcaire assez proche de celui de la Drôme des Collines. D’ailleurs, cette région produit aussi de très bons vins blancs. Nous avons ensuite changé de région pour visiter et récolter des T. aestivum var uncinatum dans une colline principalement sous tilleuls (Tilia grandifolia). Après un déjeuner copieux, tradition Serbe oblige, et dans lequel la truffe était à l’honneur, nous sommes repartis pour la dernière étape : un lieu de récolte naturel de T. magnatum, où l’essence principale d’arbre était le chêne pédonculé (Quercus robur). Finalement, après quelques dizaines de minutes, notre patience a été récompensée par la trouvaille d’une T. magnatum d’un calibre tout à fait honorable.
Ce congrès nous aura permis de découvrir la Serbie, un pays dont la culture gagne à être mieux connue, et aura été l’opportunité de discussions et échanges passionnés autour de nos champignons favoris, les truffes. La prochaine édition de la conférence TRUE devrait avoir lieu en Italie à L’Aquila en 2026.
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